Faire exécuter une décision de justice


Désaccord avec un voisin, facture impayée, malfaçon causée par un artisan, salaire non versé par votre employeur, litiges familiaux, prélèvements injustifiés... Lorsque vous êtes en conflit avec un particulier ou un professionnel, et que la voie amiable (c’est-à-dire les démarches non judiciaires destinées à régler votre litige) n’a pas donné de résultat satisfaisant, vous pouvez porter votre litige en justice, devant le juge compétent. Si le juge vous a donné raison, il faut encore s’assurer que votre adversaire remplit bien ses obligations et vous règle les éventuelles sommes dues. Seul le commissaire de justice, qui a le monopole de la signification et de l’exécution forcée, possède les moyens de faire exécuter efficacement une décision de justice en votre faveur. En pratique, cela se traduit généralement par des saisies (des avoirs bancaires et/ou des biens mobiliers notamment).

Signification et force exécutoire :
les pré-requis à l'exécution d’une décision de justice

Porter la décision de justice à la connaissance de la partie perdante : la signification par commissaire de justice.

La loi (article 675 du code de procédure civile) exige que les décisions de justice soient notifiées par voie de signification, c’est-à-dire que la décision soit officiellement communiquée à la partie adverse. Cette obligation garantit que la partie qui a perdu le procès soit informée du résultat de celui-ci et puisse ainsi prendre toutes dispositions pour éviter une exécution à son encontre. La notification d’une décision de justice doit être réalisée obligatoirement par acte de commissaire de justice. Son statut d’officier ministériel et les obligations strictes qui lui incombent permettent d’offrir des garanties aux deux parties :

  • Pour le créancier (qui a gagné le procès), la garantie que l’acte a été officiellement notifié et qu’à défaut de réaction, une procédure d’exécution forcée (une saisie mobilière par exemple) pourra être mise en oeuvre;
  • Pour le débiteur (qui a perdu le procès) la garantie d’être parfaitement informé de ses droits et des voies de recours qu’il peut mettre en œuvre contre la décision s’il estime ne pas avoir été entendu.

Comment procéder à la signification de la décision ?

Le commissaire de justice a le monopole de certains actes, dont la signification. Pour cela :

  • Munissez-vous de l'original de la décision de justice fournie par le greffe du tribunal
  • Contactez une étude de commissaire de justice située dans le ressort de la cour d’appel du domicile de la partie adverse. Il suffit de renseigner l’adresse du destinataire dans l’annuaire électronique de la profession, pour visualiser les offices territorialement compétents
  • Vous choisissez votre commissaire de justice, qui procédera à la signification, physiquement ou par voie électronique

Quelles sont les conséquences de la signification ?

  • Selon la manière dont le commissaire de justice a réussi à remettre la décision de justice à son destinataire (en main propre, sur son lieu de travail…) la nature des recours possibles pour votre adversaire varie (appel ou cassation)
  • La date de la signification est très importante car elle marque le point de départ des délais de recours

Quel est le délai pour signifier une décision de justice ?

Le jugement doit être obligatoirement signifié dans un délai de 10 ans à compter de son prononcé (article L. 111-4 du Code des procédures civiles d'exécution). À défaut et en cas de tentative d'exécution forcée, la partie adverse pourrait s'y opposer.
Le délai est réduit à 6 mois à compter du prononcé du jugement (article 478 alinéa 1er du Code de procédure civile) dans deux cas :

  • Pour un jugement a été rendu par défaut, c’est à dire en l’absence du défendeur qui ne s’est pas rendu au procès, s'il n'a pas été assigné à personne (absence du domicile, introuvable) et lorsque la décision rendue n’est pas susceptible d'appel. Cette disposition se justifie par la nécessité de protéger celui qui s’expose à une exécution forcée bien qu’un doute subsiste quant à son information.
  • Pour un jugement “réputé contradictoire” c’est à dire lorsque le défendeur a bien été assigné à personne mais n'a pas comparu et que le jugement est susceptible d'appel.

Sans signification dans les délais imposés, la partie adverse pourra s'opposer à une tentative d'exécution forcée devant le juge de l'exécution.


Votre adversaire ne respecte pas la décision de justice ?
Le commissaire de justice procède à l’exécution forcée

 

Quand et comment procéder à l'exécution forcée ?

Si votre adversaire ne s’exécute pas spontanément en réglant en totalité les sommes indiquées par le jugement, vous pouvez solliciter l’exécution forcée de la décision de justice.
Délai : vous avez 10 ans pour agir à compter du moment où la décision a été rendue exécutoire.

Le commissaire de justice a le monopole de l’exécution forcée. En effet, les procédures civiles d’exécution qui se traduisent souvent par une saisie sur les biens appartenant au débiteur (donc une atteinte à son droit de propriété) ne peuvent être mises en œuvre que par l’Etat ou par un professionnel investi des pouvoirs de la puissance publique. C’est le rôle du commissaire de justice, officier public et ministériel.
Les procédures civiles d’exécution sont des procédures encadrées par la loi dans le respect du droit des personnes. Il est interdit de tenter de récupérer soit même son dû, même accordé par le juge. Les saisies pratiquées par le commissaire de justice nécessitent parfois l'autorisation spécifique du juge.

Les différentes procédures de saisie

Si le débiteur ne s’exécute pas spontanément, le commissaire de justice procède à l’exécution forcée des décisions de justice à l’aide de procédures spécifiques : les procédures civiles d’exécution (la plupart de ces procédures sont des saisies).

Si le jugement ordonne le paiement de sommes d'argent

La saisie attribution : le commissaire de justice prélève l’argent auprès de tierce personne : employeur, établissement bancaire…

  • Saisie de valeurs mobilières (ex : actions ou parts de sociétés) pour les vendre
  • Saisie-vente de meubles : le commissaire de justice procédera à un inventaire avant la vente
  • Saisie de véhicule : le commissaire de justice immobilise le véhicule là où il se trouve ou il met en place une procédure qui “bloque” la carte grise (le véhicule ne pourra être vendu)
  • Saisie immobilière : le commissaire de justice pourra faire procéder à la vente d’une maison, d’un appartement lorsque le montant de la dette le justifie
  • Saisie de récoltes, de coffre…
Si le juge ordonne un acte de la part du débiteur
par exemple livrer un meuble, restituer un appartement, un bijou…

 

  • La saisie appréhension : le commissaire de justice va aller chercher directement le bien, chez le débiteur ou à l'endroit où il se trouve
  • La saisie revendication : le commissaire de justice immobilise des biens qui risqueraient d’être vendus ou perdus (ex : souvenir de famille)

Un cas spécifique : l’expulsion

Si la décision de justice concerne des impayés de loyer ou une occupation illégale (ex : squat) il se peut qu’elle aboutisse à l’expulsion des occupants d’un bien immobilier qui appartient au créancier. Dans cette situation également, seul le commissaire de justice est habilité à réaliser cette procédure.